Lettre d’ Eau. J’ai assez vécu pour savoir combien j’ai voulu être ici.

L'Orénoque au coucher du soleil.

Le fleuve Orénoque au coucher du soleil (photo provenant de dharix sur Webshots.com).


 

Orénoque est le fleuve
où coule l’infernal.

Le reflet bleu
dans l’eau du ciel
est le chiffre de lumière
qui explose et qui coule,
jaillissant dans le courant fluvial.

Je contemple, d’en-bas, l’eau pure du ciel.
Elle viendra bien me rejoindre.
Et j’irai bien la rejoindre.
Pluie qui tombe. Vapeurs qui montent. Je m’appelle Eau.

En attendant, je ris dans la vase accumulée du lit.
Prisonnière. J’en ris. Vaut toujours mieux en rire.
Et même si je voulais ne pas en rire, le rire est inhérent à l’eau.
Les galets s’usent sous la caresse aqueuse de moi.
On n’échappe pas à son dharma: on l’accomplit.

On ne peut consoler des galets qui n’en sont plus.
On ne peut consoler des galets réduits en poudre.
On ne peut pas consoler la poussière – ni les cités réduites en boue.
Je vis dans de l’inconsolable
qu’attouche pourtant mon rire inhérent.
On n’échappe pas à l’inhérente
complémentarité des destins.

La vase vient de l’usure,
pas seulement celle des galets, évidemment,
mais sa détrempe est ma prison.
Je suis prisonnière de mon oeuvre.
Mais, Dieu merci, à la longue, j’ai des vapeurs.
Et l’eau du ciel envie ma poudre lestante
autant que j’envie son ciel allégeant. C’est ainsi.
C’est la nature des choses.
Ce qui descend monte.
Ce qui monte descend.

C’est pas toujours marrant,
ni en montant, ni en descendant.
Mais, Dieu merci,
comme je l’ai dit,
le rire est inhérent à l’eau.

Bref,
ne m’enlevez pas mon Orénoque.
Ne m’arrachez pas tout de suite à son lit.
Sa vase a quelque chose d’attachant,
qui vit, qui copule et qui luit,
et dans l’économie universelle des choses,
j’ai assez vécu pour savoir combien j’ai voulu être ici.

Le sentez-vous? Je ris.

Orénoque est le fleuve où coule l’infernal,
et moi, j’en témoigne et j’y suis.

Gros bizous pleins de gouttes à tous mes amis,
je vous écris du fond de mon lit,
tendrement et en riant, et même si vous ne pouvez plus me boire, je demeure ici,
éternellement vôtre, malgré vous,

Eau.


© Copyright 2009 Hamilton-Lucas Sinclair ( Loup Kibiloki, Jacques Renaud, Le Scribe ), cliquer


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L'Orénoque vu de la forteresse Los Castillos - Vénézuéla. Lien Wiki aur l'image.


 

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